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Ms A 71v

de notre chère Marie, l'aînée de la famille que la dernière eut le bonheur de couronner au jour de ses noces, il fallait bien que l'épreuve vînt, nous visiter... L'année précédente au mois de Mai, Papa avait été atteint d'une attaque de paralysie dans les jambes, notre inquiétude fut bien grande alors, mais le fort tempérament de mon Roi chéri prit bientôt le dessus et nos craintes disparurent ; cependant plus d'une fois pendant le voyage de Rome, nous avions remarqué qu'il se fatiguait facilement, qu'il n'était plus aussi gai que d'habitude... Ce que surtout j'avais remarqué c'était les progrès que Papa faisait dans la perfection ; à l'exemple de St François de Sales, il était parvenu à se rendre maître de sa vivacité naturelle au point qu'il paraissait avoir la nature la plus douce du monde... Les choses de la terre semblaient à peine l'effleurer, il prenait facilement le dessus des contrariétés de cette vie, enfin le Bon Dieu l'inondait de consolations ; pendant ses visites journalières au St Sacrement ses yeux se remplissaient souvent de larmes et son visage respirait une béatitude céleste... Lorsque Léonie sortit de le Visitation, il ne s'affligea pas, ne fit aucun reproche au Bon Dieu de n'avoir pas exaucé les prières qu'il Lui avait faites pour obtenir la vocation de sa chère fille, ce fut même avec une certaine joie qu'il partit la chercher...

Voici avec quelle foi Papa accepta la séparation de sa petite reine, il l'annonçait en ces termes à ses amis d'Alençon :  «Bien chers Amis, Thérèse, ma petite reine, est entrée hier au Carmel!... Dieu seul peut exiger un tel sacrifice... Ne me plaignez pas, car mon coeur surabonde de joie.»

Il était temps qu'un aussi fidèle serviteur reçût le prix de ses travaux, il était juste que son salaire ressemblât à celui que Dieu donna au Roi du Ciel, son Fils unique... Papa venait d'offrir à Dieu un Autel, ce fut lui la victime choisie pour y être immolée avec l'Agneau sans tache.